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Publié le 21 mars 2023

L’évolution du panorama mondial des paiements

L’essor des paiements “instantanés”

Ces dernières années ont vu la mise en place d’infrastructures de paiements instantanés dans plusieurs pays et régions du monde. C’est notamment le cas en Europe (avec TARGET Instant Payment Settlement – TIPS – et RT1 d’EBEA CLEARING), aux Etats-unis (The Clearing House – TCH – Real-Time Payments) et en Asie avec la mise en place d’infrastructures de paiements instantanés à Singapour, en Malaisie et en Thaïlande par exemple.

Les paiements instantanés, déjà en place dans certains TMS, et les évolutions économiques et sociales qui peuvent en découler, semblent commencer à attirer l’attention des états, et sont par conséquent placés au centre d’initiatives régionales et nationales.

Ci-dessous une introduction aux paiements instantanés et leurs cas d’usage dans les sphères privées et professionnelles.

L’évolution des performances économiques des pays “early adopters” tend à démontrer le potentiel des moyens de paiement en tant que catalyseur de croissance économique. Dans l’année qui a suivi l’adoption de son système de paiement instantané, la Thaïlande a ainsi connu une augmentation spectaculaire de 110 % de l’utilisation des paiements mobiles. Les petites entreprises proposant des options de paiement en ligne ont quant à elles augmenté leurs ventes de 17 %, les grandes entreprises de 22 %.

Dans d’autres pays, comme l’Inde, le projet de modernisation des infrastructures de paiement vise à réduire l’utilisation du cash pour lutter contre la corruption. Afin de s’attaquer aux inconvénients liés à l’utilisation de l’argent liquide (vulnérabilité à la fraude, traçage difficile voire impossible des bénéficiaires…), le gouvernement indien a pris une mesure radicale. Le Premier ministre Narendra Modi en 2006 a en effet décidé de détruire 86% des espèces en circulation afin de prévenir le blanchiment d’argent et la corruption, provoquant un tremblement de terre économique en Inde.
Le résultat de cette réforme, appelée DBT (Direct Benefit Transfer), est probant. Selon le gouvernement indien, elle a permis d’éliminer les doubles/faux bénéficiaires et de bloquer les fuites de fonds à l’étranger. La réforme DBT aurait ainsi engendré plus de 10 milliards de dollars d’économie en 2017.

Vers un scheme panasiatique ?

En Asie, le Japon a été le pionnier dans l’adoption des paiements instantanés, avec l’amélioration du système Zengin en 1993. Pour demeurer à la pointe de l’innovation mondiale, la communauté de l’ASEAN 2025 (membres : Indonésie, Malaisie, Thaïlande et Singapour) s’est engagée à unifier et à moderniser ses infrastructures de paiement. Cela a conduit à la signature en 2017 d’un protocole d’accord visant à réaliser des paiements transfrontaliers en temps réel entre les pays membres en interconnectant leurs infrastructures de paiement.

L’accord prévoit, entre autres, l’utilisation de l’ISO 20022 comme norme de paiement pour la connectivité régionale. Il envisage en outre l’expansion de la connectivité dans toute la région, en incluant par la suite d’autres opérateurs de systèmes de paiement de la région Asie-Pacifique comme le Japon.

Toujours sur le continent asiatique, les banques nationales de Thaïlande et de Singapour prévoient de relier leurs systèmes de paiement d’ici la mi-2020, rendant possibles les paiements instantanés entre PayNow (Singapour) et PromptPay (Thaïlande).

Les paiements, “une question politique” en Europe

Un article publié le 6 novembre 2019 sur europe1.fr souligne que les banques européennes liées à la BCE (Banque centrale européenne) voient désormais les systèmes de paiement comme « une question politique de souveraineté ». En conséquence, la récente initiative de la BCE – PEPSI, rebaptisée EPI (European Payment Initiative), a vu le jour et a pour objectif de contrer les américains VISA et Mastercard, en situation de quasi duopole.

EPI propose de développer l’infrastructure actuelle de paiement instantané et de l’utiliser pour développer un standard permettant de traiter tous les types de paiements dématérialisés par carte bancaire, mobile, virement, etc. EPI vise à couvrir 60% des paiements en ligne en Europe et opère dans un contexte où la barrière ouverte par la DSP2 (règlement obligeant les banques à fournir à des tiers l’accès aux données de leurs clients sous réserve de leur consentement) pourrait favoriser la concurrence, notamment celle des BigTechs chinois et américains. À ce jour (article écrit le 27/04/2020), aucune mesure concrète n’a encore été prise par EPI.

Vers une normalisation des messages de paiement ?

SWIFT, dominant sur le marché de la communication bancaire mondiale, souhaite tirer parti de l’interopérabilité et de l’accessibilité des schemes domestiques de paiement instantané, avec l’aide de son service GPI notamment. Ce service, testé l’an passé dans le cadre de l’intégration de différents systèmes nationaux de paiement instantané (Australie, Chine, Canada, Luxembourg, Pays-Bas, Singapour et Thaïlande), doit permettre à SWIFT de rendre les paiements internationaux plus accessibles et efficaces, grâce aux infrastructures de paiement en temps réel déjà en place. Au cours de l’essai, SWIFT GPI est, par exemple, parvenu à réduire à 18 secondes le temps de transaction entre l’Australie et la Chine.

En outre, le G20, démontrant un intérêt majeur pour les avantages présentés par des paiements plus rapides, moins chers, plus transparents et plus inclusifs, a fait de l’amélioration des paiements l’une de ses priorités. Plusieurs arguments ont notamment été avancés par l’organisme, portant sur les conséquences potentielles de l’amélioration des paiements transfrontaliers : soutien à la croissance économique, au commerce international, au développement mondial et à l’inclusion financière.

Le G20 a ainsi demandé au FSB (Financial Stability Board) d’élaborer une roadmap pour améliorer les paiements transfrontaliers. Dans la publication de sa première étape, le FSB mentionne qu’une solution “pourrait s’appuyer sur les dispositifs de paiement transfrontaliers et nationaux existants ou prendre la forme de nouvelles structures et de nouveaux écosystèmes.” Cela laisse entendre que les schemes domestiques pourraient être utilisées à l’échelle internationale. Un autre élément mis en évidence dans cette première étape par le FSB est la fragmentation des normes de données de paiement, qui pourrait ouvrir de nouvelles perspectives pour la norme ISO 20022, à condition de l’imposer.

L’ISO 20022 est également au cœur d’autres initiatives prometteuses, telles que la CGI (Common Global Implementation), soutenue par SWIFT, qui favorise une plus large acceptation de la norme ISO 20022 afin de simplifier les échanges de paiement entre les banques et les entreprises.

A ces initiatives peuvent être ajoutés :

  • le protocole d’accord entre la communauté de l’ASEAN 2025, qui exige que les infrastructures des pays membres utilisent la norme ISO 20022
  • l’utilisation actuelle d’ISO20022 dans la zone SEPA avec le SCT INST
  • le remplacement prévu de la norme MT en 2025 par la norme ISO 20022 pour les paiements transfrontaliers

L’utilisation standard d’une norme de messagerie de paiement vise à entraîner, entre autres avantages, la simplification des processus de paiement et d’encaissement, tels que ceux associés au POBO et au ROBO/COBO au sein d’une structure d’In-house Bank. Elle favoriserait également l’interconnexion des schemes domestiques et pourrait donc accélérer l’émergence d’un système capable de les lier entre eux.

Auteur

Yassir Settar

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